Le besoin de retrouver du sens dans son métier est une préoccupation particulièrement prégnante après deux années de pandémie. Dans le secteur privé comme pour la fonction publique, salariés et agents rapportent, au travers de nombreux sondages et études, leur sentiment de ne pas, ou plus, être « utiles ».
Une récente publication de la revue de l’Institut de la gestion publique et du développement économique (IGPDE), s’en est fait l’écho. Au travers d’entretiens d’universitaires et de directeurs d’administration, la publication de cet institut (1) rattaché au ministère de l’Économie, se focalise plus précisément sur les agents publics dont les missions ont pour définition de servir l’intérêt général.
Les limites de la recherche de performance
« Le travail, ce n’est pas simplement l’efficacité des processus. On est fier de bien travailler, mais on est fier aussi de travailler dans de bonnes conditions, en étant reconnu, en ayant une place dans son organisation, pour laquelle on a plaisir à exercer son activité. Cela n’est pas une construction innée dans la structure : c’est un imaginaire collectif qu’il faut créer », pointe Guillaume Aujaleu, sous-directeur des politiques sociales et des conditions de travail au ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique.
Dans le cas des agents publics, le cadre au ministère du Travail souligne l’influence du virage des années 90, tourné vers la recherche de performance.
« Les agents publics, qu’ils soient français, suisses, européens, américains, canadiens…, sont intéressés à la fois par l’efficience et l’efficacité dans leur organisation. En revanche, la « nouvelle gestion publique » a orienté très fortement le curseur vers le pilotage des organisations publiques sur la base d’indicateurs qui visaient à savoir si celles-ci pouvaient développer plus d’efficience productive », fait valoir de son côté David Giauque, professeur à l’université de Lausanne, lors de cet entretien croisé.
Pour le chercheur, se focaliser uniquement sur des aspects quantitatifs revêt un risque majeur : « Celui de déshabiller le service public, et que les personnes travaillent en mode dégradé et n’aient plus aucune fierté de travailler dans le secteur public. »
Besoin de reconnaissance
Parce qu’ils sont indispensables au fonctionnement des services publics, comme a pu le mettre en lumière la crise sanitaire, il est nécessaire, selon les deux interlocuteurs, de contrer la perte de sens des agents qui n’ont plus le goût de servir l’intérêt commun. Les raisons sont connues : manque de reconnaissance, rémunération moindre que dans le secteur privé, manque de moyens…
« On commence à prendre conscience que toutes ces transformations ont un impact sur le sens du travail, sur la qualité de vie au travail et donc, par ricochet, sur l’efficacité du processus et du service public ; mais il faut inventer aujourd’hui ces plans d’accompagnement et ce nouvel imaginaire collectif et individuel. C’est vraiment là un chantier qui attend les services des ressources humaines du secteur public », met en garde Guillaume Aujaleu.
David Giauque abonde : « La question de la reconnaissance est absolument centrale parce que c’est un élément qui revient systématiquement dans la littérature scientifique, à savoir que cette reconnaissance est directement liée à la satisfaction et à l’engagement des agents. Lorsqu’elle fait défaut, on observe un lien avec la souffrance au travail et la résignation.
Un entretien à retrouver en vidéo
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Notes
Note 01 Action publique. Recherche et pratiques est la revue trimestrielle de l’Institut de la gestion publique et du développement économique qui s’adresse aux acteurs publics. Lancée en 2018, la revue a publié des articles, des interviews, des billets d’opinion et des analyses sur les thèmes concernant l’administration publique nationale et internationale. Retour au texte
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