Aston Martin DB5, la voiture de fonction de James Bond

« Où est ma Bentley ? » demande James Bond (Sean Connery) à l’agent Q (Desmond Llewelyn) dans Goldfinger, sorti en 1964. « Oh, elle a fait son temps, j’en ai peur ! », lui répond son fournisseur de gadgets avant de lui dévoiler sa nouvelle voiture de fonction : l’Aston Martin DB5. Ce coupé, né en 1963, sera désormais indissociable de l’agent britannique. Il aura beau la remplacer par des Lotus Esprit, une Renault 11, un Range Rover cabriolet, des BMW Z3, 750i et Z8, des Aston Martin plus récentes ou même une Citroën 2 CV, dans l’esprit du grand public James Bond roulera toujours en DB5. Détruite, la voiture sera reconstruite à plusieurs reprises. Elle apparaît dans huit films sur vingt-cinq entre 1964 et 2021. Si dans les romans de Ian Fleming, James Bond conduit principalement une Bentley 4½ Litre « Blower » puis une Continental Type R, ses liens avec Aston Martin apparaissent dès la publication du roman Goldfinger, en 1959. Dans celui-ci, le MI6 (Military Intelligence, section 6) lui affecte une DB Mark III destinée à faire de l’ombre à la Rolls-Royce Silver Ghost d’Auric Goldfinger (Gert Fröbe). C’est pour cette dernière que Fleming a imaginé les gadgets qui vont assurer la célébrité de l’agent 007. Elle intègre ainsi des feux modifiables pour éviter d’être suivie, des pare-chocs en acier renforcé, un Colt.45 à canon long sous le siège du conducteur, une radio intégrant un système de balise appelé Homer (l’ancêtre du GPS !) et des coffres secrets. Sauf que lorsque débute la préproduction du film Goldfinger en 1963, cette DB Mark III n’est plus au catalogue. Elle a été remplacée par la DB4, puis par la DB5. Le producteur Albert R. « Cubby » Broccoli ne s’intéresse guère à cette voiture à 4 175 livres sterling (l’équivalent de 112 000 livres en 2023). Il la juge trop coûteuse et trop confidentielle pour un film aussi grand public. Il n’a d’yeux que pour la toute nouvelle Jaguar Type E. Elle est deux fois moins chère et elle a été saluée comme « La plus belle voiture du monde » par Enzo Ferrari lui-même. Broccoli contacte donc le patron fondateur de Jaguar, Sir William Lyons, pour nouer un partenariat avec sa société EON Production. Mais l’aristocrate anglais éconduit sèchement le fils d’immigrés new-yorkais : « Pas question de fournir gratuitement des voitures puisque Jaguar a déjà du mal à produire suffisamment pour satisfaire la demande des clients qui les paient ! » Dépité, le producteur se tourne donc vers Aston Martin. La marque a été sauvée de la faillite par David Brown en 1947. L’homme est un héritier qui a fait prospérer la fortune familiale en fabriquant des tracteurs Ferguson-Brown (futurs Massey-Ferguson). Il a la réputation d’être très dur en affaires mais il comprend que James Bond peut être un formidable « influenceur » pour Aston Martin. La marque vivote avec quelques centaines de voitures produites chaque année. Il accepte donc de prêter quatre DB5 à EON Productions. Deux serviront durant le tournage de Goldfinger et deux à sa promotion à travers le monde. Avant cela, les autos sont confiées à John Stears. Ancien de la Royal Air Force, ce bricoleur de génie a la charge d’incorporer les gadgets imaginés par Ian Fleming dans son roman. Les trouvant finalement assez modestes, il va plus loin avec le bouclier pare-balles, le siège éjectable, les plaques d’immatriculation rotatives… À l’arrivée, la DB5 apparaît pendant plus de dix minutes dans Goldfinger. Son destin sera désormais d’être un personnage à part entière de la saga 007. La version miniature fabriquée par Corgi Toys sera dans les années 1960 et 1970 le jouet pour garçons le plus vendu au monde avec 4 millions d’exemplaires. La Royal Mail éditera un timbre à l’effigie de la DB5 en 2013 et la Royal Mint frappera des séries de pièces de 5 livres en 2020.

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Après le tournage, la voiture portant le numéro de châssis DP/216/1 a été dépouillée de ses gadgets et remise sur le marché par Aston Martin. Son propriétaire américain la louera ensuite pour la production de Cannonball Run (1981) dans lequel elle sera conduite par Roger Moore. Volée en Floride en 1997, cette DB5 n’a toujours pas été retrouvée. L’autre DB5 qui apparaît dans le film (châssis DB5/1486/R) a été acquise en 1969 par un journaliste américain, Jerry Lee. Elle a été revendue en 2010 pour 4 millions d’euros. Les deux autres utilisées dans le cadre de la promotion du film ont également trouvé preneur. Le châssis DB5/2017/R est aujourd’hui visible au musée Louwman à La Haye, aux Pays-Bas, considéré comme le plus beau musée automobile d’Europe. Quant au numéro DB5/2008/R, il a été acquis en août 2019 par un collectionneur privé pour 5,75 millions d’euros. Toutes les DB5 qui apparaîtront dans les James Bond suivants seront d’autres voitures louées ou des maquettes reconstruites pour les besoins du tournage.

Un des 25 exemplaires de la DB5 Goldfinger Continuation. Une réédition qui a nécessité 4 500 heures de travail pour retrouver la route.

Un des 25 exemplaires de la DB5 Goldfinger Continuation. Une réédition qui a nécessité 4 500 heures de travail pour retrouver la route. © ASTON MARTIN

Il faut dire que Goldfinger a vraiment permis à Aston Martin de prendre son envol. Alors que 1 204 exemplaires DB4 ont été produits entre 1958 et 1963, 1 059 DB5 seront vendues en seulement dix-huit mois après la sortie du film. C’est du jamais vu pour la marque ! Plus de 900 sont des coupés identiques à celui de Sean Connery. Mais la marque écoule aussi 123 cabriolets ainsi que 13 – on ne peut plus britanniques –, « breaks de chasse ». À conduire, la DB5 est plaisante et bien plus facile à dompter qu’une Ferrari de la même époque. Avec son moteur 6 cylindres de 4 litres donné officiellement pour 280 chevaux, elle est aussi moins performante qu’une Jaguar Type E. La suspension n’est pas trop dure et la direction plutôt précise pour l’époque. La boîte de vitesses propose 5 rapports qu’il faut bien découper sous peine de craquements douloureux pour les oreilles. Si elle accélère vite (8 secondes pour le 0 à 100), la DB5 freine plutôt moins mal que ses congénères… mais sur sol mouillé, il n’y a plus personne. Seulement, à son volant, l’Aston Martin procure le plaisir unique de se prendre pour James Bond. Et avec le thème musical de Monty Norman en tête, l’autoradio relève du gadget. C’est ça toute la magie de la chose : permettre au quidam d’incarner le plus célèbre des agents secrets.

John Stears, bricoleur de génie, a la charge d’incorporer les gadgets imaginés par Ian Fleming

Face au succès des ventes aux enchères de tout ce qui est en lien avec l’agent 007, le constructeur de Gaydon a décidé de refabriquer à l’identique 25 exemplaires de la DB5 originale couleur Silver Birch (Bouleau Argent) dans ses ateliers de Newport Pagnell. Baptisée DB5 Goldfinger Continuation, chaque voiture a nécessité 4 500 heures de travail pour pouvoir être mise à la route. Détail amusant, le constructeur ne s’est pas contenté de proposer une simple voiture mais l’a enrichie des gadgets identiques à ceux de l’espion. Et comme au cinéma, les mitraillettes dans les phares sont factices. Prix de l’engin : 3 millions d’euros hors taxes. Pour Aston Martin, reproduire à l’identique ses anciens modèles est plus un enjeu de communication que de rentabilité réelle. Cela permet d’employer des artisans d’art à plein-temps, mais la marge sur ces rééditions est quasi inexistante. Lancée en pleine crise du Covid 19, la voiture a connu une panne de démarrage au point qu’Aston Martin a dû convier quelques journalistes pour l’essayer. Un seul Français a eu ce privilège, notre confrère Nicolas Meunier du magazine Challenges. « J’ai parcouru la distance entre l’atelier d’où sortent ces Aston jusqu’au golf de Stoke Park, au sud de Londres, où a été tourné Goldfinger, raconte l’agent Meunier. Sur environ 120 km, j’ai eu l’impression de conduire une vieille voiture mais réalisée avec des matériaux modernes de meilleure qualité. » Mais malgré l’enthousiasme suscité par cette réédition, Aston Martin a eu du mal à la vendre. Et pour cause… Dans la mesure où la DB5 Continuation Goldfinger ne répond à aucune norme actuelle en matière d’environnement ou de sécurité, elle ne peut être homologuée que très difficilement ailleurs qu’en Angleterre… « La plupart des clients s’en fichent. Ce sont soit des milliardaires qui veulent juste la posséder dans leur garage et frimer avec devant leurs copains, soit des princes du Golfe qui ne sont pas concernés par les contraintes légales occidentales… »

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