Airbags défectueux : dans « la colère et les larmes », ces Bordelais veulent rendre justice à leur fils décédé

Un olivier vient d’être planté dans le jardin de la maison familiale, en hommage à Tristan. Plus d’un an après le décès de leur fils, Muriel et Bruno Guérin tentent d’avancer, comme ils le peuvent, malgré un parcours judiciaire au long cours face au groupe Stellantis, détenteur de la marque Citroën, qu’ils estiment responsable du drame. Ces deux Bordelais, installés en Guadeloupe depuis la fin de leurs études il y a maintenant trente-deux ans, ont gardé cette échoppe du quartier Nansouty. Les souvenirs de leur fils jonchent encore la pénombre de celle-ci. « Il y a vécu sept ans, y a passé le baccalauréat et même, le confinement », se remémorent les parents. Tristan, revenu en Guadeloupe en août 2022, a perdu la vie dans un accident de la route le 16 mai 2023, à l’âge de 26 ans.

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« Il venait d’avoir le permis et nous lui avions offert une Citroën C3 de troisième main », livre le père. Ce jour-là, dans les embouteillages à 8 heures du matin, Tristan percute le véhicule d’en face. L’expertise révélera que le jeune homme, sur cette route limitée à 50, roulait à 48 km/h. « On a vite compris que le choc de l’accident n’avait rien à voir avec sa mort », pose Bruno Guérin entre deux bouffées de cigarette.

Ampleur internationale

Après « quelques jours de flou total », les résultats de l’autopsie révèlent la cause du décès ; aucune blessure n’est due au choc mais, un projectile métallique a transpercé le nez, puis l’œil, pour ensuite se loger dans le cerveau. Tristan est mort sur le coup. Au lendemain des obsèques, la famille Guérin dépose plainte contre X pour homicide involontaire.

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Cette pièce métallique proviendrait de l’airbag défectueux de la marque Takata, ancien équipementier japonais. Très vite, le couple comprend que le décès de leur fils s’inscrit dans une affaire d’ampleur internationale, « l’un des plus gros scandales automobiles du siècle ». Dès 2014, la justice américaine ordonne le rappel de 70 millions de ces airbags, suite à des décès suspects. En cause, l’utilisation d’un agent chimique, le nitrate d’ammonium, qui se détériorerait rapidement et entraînerait l’explosion des airbags de façon imprévisible. L’entreprise Takata est reconnue coupable et dépose le bilan en 2017. Selon le régulateur américain, 27 décès et au moins 400 blessés ont jusqu’à présent été attribués à cette marque aux États-Unis. En France, il faudra attendre 2020 pour qu’une première campagne de rappels soit réalisée, dans les départements et territoires d’outre-mer.

« On apprend que notre fils est le sixième mort de Guadeloupe, qu’il y en eut aussi en Guyane, à la Réunion… »

Tandis que son mari se replonge dans le récit du drame, Muriel, penchée sur la table du jardin, épluche le dossier qu’elle connaît par cœur. À l’intérieur, le rapport de police, des photos du véhicule accidenté, des coupures de presse et le recensement des cas similaires. Après le décès de Tristan, une pétition est lancée par ses parents et les témoignages affluent. « On apprend que notre fils est le sixième mort de Guadeloupe, qu’il y en eut aussi en Guyane, à la Réunion… Tous les DOM-TOM sont concernés », fait état le père. En plus des morts, on compte aussi une dizaine de blessés graves. « Des gueules cassées », illustre Muriel. Tous ont reçu le même projectile métallique lors du déploiement intempestif de l’airbag, seule la trajectoire était changeante.

Les cas de blessés ou de morts par airbags défectueux ont majoritairement lieu dans les territoires d’outre-mer en raison du climat.
Les cas de blessés ou de morts par airbags défectueux ont majoritairement lieu dans les territoires d’outre-mer en raison du climat.

E. S.

« Un fusil chargé à bout portant »

En juin 2023, trois juges d’instructions sont nommés pour le dossier, auquel le couple aura accès en mars 2024 lors de leur première audition. « On s’attendait à ce qu’il y ait une perquisition chez Citroën, une saisie des disques durs et des notes internes, mais rien… La colère monte », déplore le couple. Ils dénoncent une mauvaise gestion des rappels de la part des constructeurs mais aussi, de la part des agents du contrôle technique. « On l’a fait passer quinze jours avant le décès de Tristan. Tous ces gens-là savaient, depuis 2014, qu’ils laissaient des gens avec un fusil chargé à bout portant dans la bouche. Si les gens avaient fait leur travail, Tristan serait peut-être encore en vie aujourd’hui », s’étrangle le père.

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« Si les gens avaient fait leur travail, Tristan serait peut-être encore en vie aujourd’hui »

Depuis le décès de leur fils, trois cas supplémentaires ont été recensés en Guadeloupe. « En métropole, il n’y en avait aucun et c’est bien pour cela que ça n’intéressait personne », pense-t-il. Des cas de blessés et de morts sont recensés dans le sud de la France et, en avril 2024, Citroën lance un rappel sur des milliers de C3 et DS3 produites entre 2009 et 2019, dans la zone située « en dessous d’une ligne Clermont-Ferrand/Lyon » [l’agent chimique utilisé dans les airbags Takata se détériore avec la chaleur et l’humidité, NDLR]. Au total, cela représente 8 millions de véhicules dans une vingtaine de pays, avec une quinzaine de marques – Audi A4 et A6, Toyota Avensis et Yaris 3 ou encore BMW – qui s’ajoutent.

Statut de victime

Pour justifier cette campagne de rappels tardive, en comparaison avec le premier scandale d’il y a presque dix ans plus tôt, Stellantis France a assuré à « Sud Ouest » que Takata avait nié « tout problème pour les productions issues de leurs usines européennes » en 2014. Une surveillance des airbags avait été déployée par Citroën en 2016 et, dès décembre 2023, une campagne de rappel s’était lancée après avoir « estimé qu’il pouvait y avoir un risque en Europe du sud et dans les autres pays du bassin méditerranéen ».

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Pour Charles-Henri Coppet, l’avocat de la famille Guérin et d’une quinzaine d’autres victimes, « il y a une réelle inertie et un vrai manque de flexibilité par rapport au niveau de danger ». L’avocat spécialiste en droit du dommage corporel appelle à ouvrir une instruction unique confiée à un pôle spécialisé de santé publique. « La justice doit s’adapter à l’importance de cette affaire, tirer les conséquences et offrir aux victimes une enquête digne de ce nom », estime-t-il.

En avril 2024, Muriel et Bruno Guérin ont monté une association de défense des victimes d’Airbags qui regroupe aujourd’hui une centaine de membres. Pour eux, le chemin du deuil est encore long. « On verse des larmes mais, la colère a pris le dessus. On ira jusqu’au bout pour que justice soit faite pour notre fils et que l’on reconnaisse son statut de victime », revendique le père.

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